13/01/2018 – On a roulé des mécaniques

Samedi 13 janvier.Journée spéciale. Les bonnes résolutions cyclo de fin 2017
vont trouver aujourd’hui leurs toutes premières concrétisations.Nous sommes neuf
membres du CRA à nous être inscrits à un stage mécanique de terrain proposé par le
CODEP et généreusement pris en charge par ce même Comité Départemental du Tarn de
Cyclotourisme et par notre cher CRA.
Nous avons rendez vous à 9H dans l’aile briquée toute récente du Comité Départemental
Olympique et Sportif, en sortie d’Albi, route de Cordes. Ponctuel, j’y retrouve
le couple présidentiel Marie et Bernard , Maryse, Mireille, Jean de Cambon, Jacques C ,Jean
Louis C et Jean Marie P.
On se sent tous motivés pour mieux maîtriser quelques uns de ces désagréments rencontrés en
sorties solitaires ou de groupe . Notamment, bien sûr, la fameuse crevaison de la roue
arrière .Finis les « moi ,si je crève et que c’est dur, j’appelle le mari au téléphone…moi, j
‘ai souvent plein de copains moins niais que moi et je les laisse faire mais c’est pas comme ça
que je progresserai …moi, en solitaire,j’y arrive mais j ‘y passe un quart d’heure ou plus, là où
les érudits réparent en trois minutes ! Je veux gagner en technique pour réparer
plus vite ,rentrer avant la nuit!».
On fait connaissance du duo de formateurs.Eric et Jean François. Beau duo.Deux générations
bien différentes et une même passion vite démonstrative , quoique différente, pour faire
partager à travers des formations techniques une même conception des liens entre la vie et le
vélo.
Ils témoignent tous deux d’un même Vélo-Art de Vivre .Une passion que l’on sent dominante (
dévorante?) chez l’un et l ‘autre.
De cela, on parlera plus tard. Lors du déjeuner.Pour l’instant, place à la formation
du jour dite mécanique de terrain.Et là,rapidement, après le café, changement d’ambiance.
Court flottement. On apprend que cette formation, la seconde d’un cycle tri annuel des deux
acolytes, concerne les roulements. !.Les quoi ? Les roulements !…
Brr, chacun a du entendre vaguement parler de ces bébètes mais de là à passer une journée à
leur chevet. Même notre Président-ingénieur,efficace relayeur et recruteur de cette formation,
semble surpris ! Quant à Maryse, Marie, Jean et moi…
La formation,démarre comme si de rien n’était, par un apport théorique sur les normes de
filetage dans l’industrie du cycle avant de vouloir tout nous dévoiler sur les roulements.Tous les
roulements, ceux du pédalier, de la direction, des moyeux des roues ,des pédales et des galets du
dérailleur arrière.Ouf !
Autant de pièces à conviction toutes rangées et dévoilées l’une après l’une
par nos formateurs dans d’adorables boites boisées agrémentées de légendes à l’écriture
manuscrite et à l’encre sentant si bon et si vrai les valeurs pédagogiques en cours au siècle
précédent.
Va t’on pour autant rouler des mécaniques ? Fussent_elles de terrain ?Waouh,
le choc est rude pour plusieurs d’entre nous qui échangeons sourires, soupirs et
interrogations sourcilleuses . On est loin de nos souhaits initiaux de maîtriser simplement
crevaisons et bris de chaînes.
On prend le parti d ‘écouter, d’essayer de comprendre, de mettre les mains là où il faut pour
les exercices pratiques du côté de l ‘entretoise ou de la roue-libre, quitte à n’en retenir
qu’une faible partie.
Au moins, même si on continue de porter le vélo chez notre vélociste préféré, deviendrons –
nous un peu plus capable d’expliquer la raison de notre visite. « …Je crois que ce bruit
vient des manivelles des pédales…sûr que j ‘ai un souci du côté des galets du dérailleur ! …
Regarde donc du côté de la direction, y ‘a un truc dans les roulements !».
On s’accroche comme on peut. Mireille nous semble maîtriser le sujet et fait
aussi souvent référence au savoir faire de son cyclo de mari.
Eric parle d’une voix tellement convaincue qu ‘on ne saurait imaginer une seconde
la moindre faille dans ses propos.Lui non plus. Jean François conserve de beaux acquits
pédagogiques de sa vie de prof de SVT à Fontlabour et nous entraîne avec douceur sur ses
certitudes.Avec lui, on mesure aussi les évolutions dans les matériaux de fabrication des cadres,
des moyeux,des jeux de direction, des pédales etc. Plus légers, plus fragiles, plus chers entre
autres…
Le temps passe.Vient la pause déjeuner.
J ‘ai adoré ce moment de confiance partagée durant lequel on apprend tant sur les autres.
Eric est un mineur carmausin stoppé dans son métier adoré de tourneur ajusteur à… 43 ans
lors de la fermeture du bassin . « Bon d’accord, depuis , et ça fait un bail, je continue jusqu’à
la retraite à toucher mon salaire, mais ne crois pas que ç’a a été toujours facile d’ intérioriser
qu’il valait mieux que je ne travaille plus ici ou ailleurs ! » J’écoute tout en ne pouvant m
’empêcher de comparer son époque et nos années actuelles.Je comprends mieux aussi son
engagement associatif permanent et son goût de transmission de ses connaissances.
Belle discussion aussi avec Jean Louis C relatant son ressenti lorsque,en 2012, des hauteurs de
la Drêche, il a assisté à la destruction par dynamite , en 18 secondes, de
la centrale thermique de Pélissier, son usine durant de longues années. « Les gens, autour de
moi, ont à ce moment précis respecté mon souhait de silence.Ils ont compris et partagé mon
émotion ! ».
Enfin, beau silence aussi lorsque Jean François nous parle du Brevet cyclo des Provinces
Françaises . « Je l ‘ai commencé il y a quelques décennies puisque le jeu consiste à
faire tamponner une carte dans chacun des six sites retenus dans chaque département
parcouru en vélo.Soit 540 au total… très variés question relief…aussi bien le Tourmalet que
le château de Chambord.A ce jour, il m’en manque 20 et ce sont plutôt la Picardie et la
Bretagne qu’il me faut parachever ! J ‘aurai alors bouclé mon parcours de sacochard,comme on
aimait s’appeler dès les années 60 !»
Quelle richesse humaine que ce CRA dont je commence à connaître tant et tant de
personnalités réunies, à l’insu de leur plein gré, par le vélo !
L’après midi, Eric et Jean François satisfont tous nos désirs . Et nous voilà entrain de repérer
la fuite dans une chambre à air, d’en crayonner le pourtour, de poncer, de vulcaniser, de
regonfler. A la vérité, on maîtrise tous cet exercice à peu près correctement.Mieux que
le démontage et le remontage d’une roue arrière.Je m ‘y attelle dans les premiers ,
ce qui laisse aux copains de quoi largement faire mieux et plus rapidement. On y prend tous
plaisir.
Reprise théorique sur les dérailleurs. Place ensuite aux explications sur les chaînes .On
termine les travaux pratiques en se familiarisant avec la manipulation d’un dérive chaîne et de
quelques attaches rapides.
Goûter albigeois final offert par la First Lady devenue reine de la galette lors du dessert de
midi. Debriefing, verre en main.Nettoyage de la salle avenante du CDOS et
rangement de toutes les boites et matériels dans la remorque appropriée.
Ah cette remorque en lattes de bois.Aménagée de A à Z en compartiments de rangements par
Eric. « Tu comprends, je savais ce que je voulais…les roues par ci, les cadres par là…chaque
pièce a sa place particulière même les vis, les écrous,les boites de pédales,les clés , les potences,
les dérailleurs, les … »
En entrant dans cet antre , je me suis imaginé pénétrer dans l ‘atelier d’un maître artisan ou
d’un compagnon du devoir. C ‘en est un, mobile..
On a pris un peu de temps pour se quitter .Preuve qu ‘on était bien ensemble et que,
finalement, rouler des mécaniques avec Eric et Jean François nous a bien plu.
Michel DOUMERC
(14 janvier 2018)